La France, confinée depuis le 17 mars 2020, traverse sa plus importante crise sanitaire depuis plus d’un siècle. Malgré une sensible amélioration de la situation dans les hôpitaux, synonyme d’espoir pour les semaines à venir, les français doivent continuer de respecter des mesures barrières strictes afin d’endiguer au mieux l’épidémie. Ce contexte particulier a fait émerger une pratique déjà bien connue des médecins mais qui était encore loin d’être la norme au sein de la population française il y a quelques mois : la téléconsultation.
Le recours à la téléconsultation a explosé durant le confinement
Les centres de soins déjà surchargés et le confinement ont littéralement fait exploser le nombre de consultations à distance en France. Pour cause, on recense pas moins de 486 369 téléconsultations facturées à l’Assurance Maladie pour la semaine du 23 au 29 mars 2020* (contre seulement 60 000 sur une année, entre septembre 2018/2019).**
Le docteur Guillaume Badiou, qui exerce actuellement en tant que médecin généraliste en centre de santé, et également en téléconsultation pour Concilio a pu constater l’évolution des comportements de ses patients vis-à-vis des consultations à distance depuis le début du confinement.
Comment ressentez-vous l’évolution de la téléconsultation depuis le début de l’épidémie ?
Dans le contexte de pandémie à SARS-cov-2, la téléconsultation est naturellement apparue comme étant une solution pour permettre d’accéder aux soins, dans le respect des gestes barrières. Les patients ne s’y sont pas trompés, et la demande de téléconsultations suit une croissance exponentielle ces dernières semaines.
La consultation physique reste-t-elle encore la norme?
Non, la consultation physique n’est plus la norme. L’épidémie a accéléré l’utilisation massive d’outils que nous maîtrisons déjà depuis longtemps chez CONCILIO, et dont nous connaissions les capacités : ils nous permettent de résoudre à distance l’écrasante majorité des problèmes de santé. C’est ce format de consultation qui est en passe de devenir « la norme ».
Pourriez-vous quantifier la proportion de vos consultations physiques et à distance depuis le début du confinement ?
Depuis le début du confinement, je consulte à distance dans 80% des cas. La téléconsultation me permet de poser des diagnostics et de traiter des problématiques médicales complexes, sans faire prendre aux patients le risque de rompre leur confinement.
Lorsque c’est nécessaire, je propose un rendez-vous en consultation présentielle à mes patients, ou je les dirige vers un confrère en capacité de les examiner.
Il n’y a d’ailleurs pas d’opposition entre la consultation physique et la téléconsultation : elles répondent toutes deux à des problématiques différentes, et peuvent être complémentaires.
Il n’y a d’ailleurs pas d’opposition entre la consultation physique et la téléconsultation : elles répondent toutes deux à des problématiques différentes, et peuvent être complémentaires. Associées, elle représentent à mon sens ce que la médecine moderne fait de mieux. C’est d’ailleurs ce que nous faisons chez Concilio en proposant des démarches de santé à distance et à la fois en physique en fonction de la problématique de chaque patient.
Certains médecins traitants imposent désormais la téléconsultation lorsqu’elle est compatible avec la problématique de santé de leurs patients, est-ce une bonne idée ?
La pandémie que nous vivons impose un confinement strict et les outils numériques d’aujourd’hui permettent de répondre aux problèmes posés avec la même rigueur et la même qualité qu’en consultation physique. Il est de notre devoir de ralentir cette épidémie et il me semble donc être une bonne idée de proposer préférentiellement une téléconsultation pour évaluer s’il est indispensable de se rendre au cabinet. Cela fait d’ailleurs partie des recommandations des pouvoirs publics. Bien entendu, si un patient doit être examiné, je sais l’orienter et lui proposer la prise en charge la plus adaptée, voire lui proposer un rendez-vous en consultation physique avec moi.
Quels sont les retours des patients ? Comment jugent-ils cette nouvelle pratique ?
Les retours sont excellents. Les réticences initiales tombent assez rapidement car les résultats sont là.
Les patients ne souhaitent pas prendre le moindre risque, ils ont bien compris la gravité de la situation. Aussi, ils ont pu vérifier que beaucoup de problèmes peuvent être pris en charge à distance facilement, rapidement, et sans que la qualité des soins soit altérée, bien au contraire.
Réponse à un questionnaire de satisfaction après une téléconsultation Concilio.
Est-ce le rôle des médecins de proximité de sensibiliser à l’utilité de la téléconsultation durant cette crise ?
Oui, je pense qu’il est du devoir de chacun de limiter la propagation de l’épidémie. Dans ce contexte, il est de notre rôle d’expliquer aux patients les avantages des outils qui peuvent leur éviter de contracter une maladie potentiellement grave, et qui aident à freiner l’épidémie.
Il est aussi important de rappeler que les problèmes de santé ne doivent pas être passés sous silence pendant le confinement, par peur de se rendre chez un médecin, au risque de voir se développer des complications difficiles à traiter : il faut téléconsulter.
Les téléconsultations sont-elles plus fréquemment utilisées par vos patients pour des motifs liés au Covid-19 ou pour des démarches de santé habituelles ?
Les consultations pour des motifs liés au Covid-19 ont évidemment connu une croissance exponentielle. Néanmoins, nous assurons un suivi personnalisé des patients et de nombreux patients utilisent les téléconsultations pour des motifs tout à fait habituels.
Consulter à distance confère de nombreux avantages aux patients mais également aux professionnels de santé. Quels sont-ils ?
Pour les professionnels de santé, la téléconsultation confère une plus grande flexibilité. Le médecin peut organiser son planning plus facilement, ce qui lui laisse plus de temps pour prendre soin de ses patients, tout en respectant lui-même un confinement strict.
Pour les patients, les avantages sont là aussi écrasants : la téléconsultation permet d’entrer en contact rapidement avec un médecin qui vous connaît, par téléphone ou en visio, de n’importe quel endroit du monde, et d’obtenir rapidement une réponse à une problématique de santé, sans rompre le confinement. Terminés les heures interminables dans des salles d’attente et le médecin injoignable !
Quelles sont les principales différences entre une consultation physique et une consultation à distance pour vous et pour vos patients ?
La téléconsultation n’a rien à envier à la consultation physique : elle fait la part belle à l’écoute et le dialogue y occupe une place centrale.
Le format, contrairement à ce qu’on pourrait penser, créé une certaine proximité entre le médecin et le patient car l’interrogatoire se doit d’être minutieux. Le médecin doit être concentré et ne rien omettre car il ne peut s’aider de ses autres sens pour conforter son diagnostic. Le patient perçoit indéniablement cette écoute attentive. C’est encore plus flagrant en psychiatrie, où il est beaucoup plus facile de mettre des mots sur ses symptômes par téléphone, plutôt que d’essayer de le faire dans un cabinet médical, après une attente pénible de plusieurs semaines pour obtenir un rendez-vous.
Les consultations de dermatologues ont elle aussi changé de visage : après un échange de photos, le médecin met en place une stratégie de traitement et peut prendre le temps d’expliquer toute sa démarche.
Selon vous, le rôle de la téléconsultation dans la crise du Covid-19 va-t-il permettre de démocratiser cette pratique une fois le confinement terminé ?
Oui, en tout cas je l’espère. Alors que plus de 5 millions de français n’ont pas de médecin traitant, la téléconsultation semble être l’arme ultime pour lutter contre les déserts médicaux, désengorger les hôpitaux à bout de souffle, et favoriser l’accès aux soins.
Il est sûr que cette crise sanitaire aura un impact non-négligeable sur l’évolution de la téléconsultation dans les années à venir. Aujourd’hui, la consultation à distance représente déjà une réponse de taille face aux nombreuses problématiques liées au confinement et aux déserts médicaux. Elle représente un réel avantage pour le suivi de nombreux patients et permet d’éviter un déplacement aux urgences dans plus de 33% des cas.***
Sources :
*Caisse nationale de l’Assurance Maladie – « Croissance record du nombre de téléconsultation en Mars » (31 mars 2020)
** Amélie.fr – « Première bougie pour la téléconsultation » (11 septembre 2019)
*** Pourcentage des téléconsultations Concilio ayant permis d’éviter un déplacement aux urgences d’après les réponses données aux questionnaires de satisfaction client Concilio.